Anaïs Marion
Née à Metz en 1992, Anaïs Marion vit et travaille à Poitiers (France).
Après deux années de journalisme, elle se tourne vers les arts visuels et obtient son DNSEP à l’École Européenne Supérieure de l’Image (ÉESI Poitiers) en 2017. Elle s’intéresse très vite aux enjeux politiques liés à la mémoire des conflits et aux archives. Elle commence à collectionner des documents au cours de plusieurs voyages. Son essai "7,62" retrace à la première personne son enquête sur des musées de guerre et les politiques de la mémoire en Europe.
Elle développe depuis plusieurs années un travail d’écriture et de lectures performées. Son travail d’écriture et de collection l’amène régulièrement à envisager l’exposition comme essai visuel et à se positionner comme artiste-commissaire. Elle a participé aux Rencontres internationales de la jeune photographie (CACP-Villa Pérochon), à la programmation OFF de la Biennale de Dakar 2018, et a été nominée pour le Prix Robert Schuman 2019 (Luxembourg).
-
Atlas Bellone (inventaires choisis)
Collection et protocole de prise de vue, work-in-progress, depuis 2013
à ce jour 18 photographies couleur, impression jet d'encre, 60 x 80 cmCette série de photographies, à la manière d’un Atlas Mnémosyne revisité, est un protocole de prise de vue qui fixe des compositions d’objets souvenir et supports de communication collectés dans des musées de guerre et des lieux de mémoire. En consignant méticuleusement ce qui n’est pas censé l’être, l’Atlas Bellone interroge les « traces » de l’Histoire et les enjeux politiques et économiques liés à leur mise en valeur. Les événements historiques célébrés et le moment où « j’y suis allée » se chevauchent ; les géographies se mélangent. À l’inverse des discours portés par ces objets, Bellone, déesse romaine de la Guerre, incarne davantage les horreurs de la guerre que ses aspects héroïques.
-
Atlas Bellone (Le théâtre des opérations)
Work-in-progress, série de 30 photographies couleur à ce jour
tirages numériques sur papier affiche, 24 x 36 cm, 2019Cette série met en scène des objets dérivés trouvés dans des boutiques de musée de guerre. On peut se demander s’ils cherchent à réactiver la chose de la guerre plutôt qu’à incarner une idée commémorative, entre fascination, nostalgie et hommage. Présentés, activés, j’emprunte aux codes de la photographie de mode ou publicitaire pour montrer ces objets qui décorent, s’utilisent et se consomment : magnets, briquets, crayons, porte-clés, verres, etc.
-
7,62
Edition, 144 pages, 2017
De la boutique souvenir d’Utah Beach à un stand de tir en Ukraine, 7,62 est une enquête qui retrace l’histoire d’une munition vendue comme un souvenir du débarquement en Normandie. Je traverse de nombreux musées de guerre, j’observe les pratiques touristiques, commerciales et politiques liées la mémoire et au monde militaire. Ce récit souligne interroge la place de la violence dans l’imaginaire collectif.
-
Mare nostrum (et la mer était d’acier et le ciel de feu)
Lecture-performance de 11’30’’, 2016
Je suis allée à Beyrouth pour photographier la Méditerranée, qui, dans la littérature sur la guerre civile, est omniprésente. Chaque jour, je longeais la côte au plus près, mais le front de mer me restait étrangement inaccessible. Dans cette lettre à la mer, je lui demande où elle se cache. Je mélange des lectures, des histoires de corruption liées à la privatisation de la côte depuis la fin de la guerre, des photographies cartes postales et des vidéos personnelles. Réalisée en 2015 peu après la crise médiatique des migrants qui a marqué l’été, cette performance interroge la peur de ce qui vient de la mer, ce qu’elle incarne, la notion de frontière et de danger.
-
Baghdadbahn (une ligne dans le désert)
Projet en cours (vue d’atelier), 2018 - 2019
En août 2018, j’ai suivi les traces de la Baghdadbahn, chemin de fer construit par l’Allemagne à partir de 1890 pour connecter Berlin à la capitale irakienne. Héritier de l’impérialisme économique du XIXe, ce train aurait été imaginé pour rapatrier des pièces archéologiques grandioses depuis la Mésopotamie jusqu’aux vitrines du Pergamon Museum. En faisant ce chemin à l’inverse, j’ai réuni deux corpus d’images et de récits : d’une part, les documents collectés lors de mon voyage, photographies, pierres de ballast, notes, etc. D’autre part, les objets dérivés et à « double usage » édités par les musées européens, reproductions de pièces archéologiques qui deviennent des sous-verre, des serre-livres ou des magnets. Ces deux ensembles évoquent écriture de l’histoire et invention de l’écriture.