Sophie Revault-Golvin
Emprunte de culture méditerranéenne depuis son enfance, Sophie Revault-Golvin, peintre plasticienne, a vécu une expérience artistique exceptionnellement intense pendant onze ans à Karnak, dans l’actuelle région de Louqsor.
Auprès de son mari, Jean-Claude Golvin, architecte archéologue, directeur de recherche au CNRS et directeur du Centre Franco-Egyptien de Karnak (mission archéologique permanente), elle découvre les vastes
ensembles des temples de Karnak et laisse l’Egypte l’imprégner en profondeur.
Entouré par le Nil et la montagne de Thèbes, elle plante le décor de sa production artistique. Elle y organise pendant 5 ans une résidence d’artistes plasticiens, au sein de la Mission Archéologique du CNRS
des Temples de Karnak, à Louqsor, Égypte, avec le concours du Ministère des Relations Extérieures français et Marie-Claude Volfin, Ministère de la Culture.
Sophie Revault-Golvin passe son enfance et son adolescence en Tunisie (de 1947 à 1960) et se nourrit des cultures tunisienne, française et du monde romain antique. Après des études littéraires à la faculté d’Aix-en-Provence, elle parcours le monde et l’histoire avec son mari architecte archéologue : trois ans à El Djem en Tunisie puis onze ans à Karnak en Egypte.
Après une courte période d’acculturation en Egypte, elle s’imprègne avec émotions, pendant plus de dix ans, de la culture locale en partant à la découverte du désert et des temples, en longeant le Nil à la marche, en arpentant les pas des Anciens venus rendre hommage il y a plus de 4000 ans à leur divinité, origine de toute source de vie.
Ainsi, son travail en Egypte et après, témoigne de la richesse qu’offre ce pays, une richesse sensorielle, en harmonie avec les éléments qui composent ce paysage extraordinaire : la terre du désert, l’eau du Nil et le soleil du dieu Râ.
Cette matière collectée, regardée, touchée porte toute la spiritualité des Anciens. Cette « présence humaine émouvante » inspire et insuffle une énergie aux oeuvres de Sophie Revault-Golvin.
-
Graffiti
Avant de partir d’Egypte, Sophie R-G a collecté un ensemble de graffiti de pieds de prêtres et de pèlerins gravés avec soin (orteils, ongles, sandales) dans la pierre des toits du temple de Khonsou, face au soleil, pour un rite de survie dans l’au-delà.
Il y eut d’abord des peintures sur toile recouverte d’un voile de papier
arraché par endroits, signifiant l’action de la lumière rase faisant ou effaçant la lecture des graffiti. -
Pierre sacrée
"— Comment cela s’est-il passé, ce travail sur les pierres ?
— La dernière année, juste avant de partir définitivement—avec, je peux dire, l’angoisse de la perte, … dans l’urgence, un désir de tout emporter… Donc un corps à corps physique, immédiat, entre l’objet à prendre et moi, à travers les pigments, la cire, le papier…
Tout ce que j’ai réussi à m’intégrer plastiquement dans ce pays, au bout de ces onze ans, en réunissant l’émotion, le sens et l’observable… tout a pris sa place dans ces papiers.
La pierre et la lumière-symbole, c’est tout ce que je voulais dire ici.
Mon choix a toujours été de ne pas prendre de distance mais au contraire de m’enfoncer toujours davantage dans les choses…"Exposition Egyptes, l’Egyptien et le copte,
Extrait du journal du Musée 1999-Musée Henri Prades – Lattes (Montpellier) -
Pieds de pélerins
Quelques années après son voyage, en France, Sophie R-G revint sur le sujet des gravures de pieds de pèlerins avec une autre longue série (presque 100 pièces), plus éloignée du référent, cire à chaud et pigments sur papiers japonais feuilletés où se jouent toujours ce phénomène d’apparition / disparition-entre transparence et voile et cette perspective dans la matière.
-
Tables d'offrande
"Des objets humbles sont ici offrandes aux morts : pains, pots de miel, oies troussées, vases de bière, fleurs de lotus… Et le tableau qui redouble la table de pierre devient à son tour offrande. La peinture est don aux morts et aux vivants. Elle se présente comme nourriture, comme élément nécessaire à la vie.
Les peintures de Sophie Revault donnent enfin à penser autour du poudreux, l’effrité, le sable du désert, la poussière. Elle dit : « Le grain partout est l’atmosphère » Elle impose à la peinture une tâche difficile : ne pas être infidèle au désert, sans pourtant oublier les formes."Gilbert Lascault