Arthur Zerktouni
Dans mon travail je traite des relations entre l’ouïe et la vue, en m’attachant particulièrement à la question de l’écriture du phénomène sonore. Je sculpte des fréquences, des ondes ou encore des partitions abstraites qui oscillent à la frontière de la matérialité. Il en résulte des objets et des installations cinétiques qui perturbent les sens et où le fil, matière récurrente dans ma production, se présente comme la dernière frontière du visible.
Je considère dès lors le fil comme une abstraction mathématique qui me permet de dessiner les contours d’une vision d’un monde fait de vide et de vibrations.
Parallèlement à ce travail, je crée des installations qui utilisent l’eau et la lumière comme matières premières. Ce versant de ma production artistique interroge la mémoire et pose la question de l’oubli d’un souvenir. Vers où et comment nos pensées perdues coulent-elles ? Existe t’il un lieu rempli de nos souvenirs en fuite ?
Ces installations sont les traces éphémères d’une rencontre entre le spectateur, l’oeuvre et un souvenir qui s’échappe. L’eau qui les compose est une métaphore du temps ; la lumière et les silhouettes qu’elle dessine : de vagues impressions, des fantômes translucides qui tentent de nous contacter depuis un monde qui n’existe plus.
Tant avec le fil qu’avec l’eau, j’oscille constamment entre les sens et les médiums qui y sont attachés. Entre ce qui les sépare, je donne à voir l’idée d’un univers trouble dont la matérialité serait illusion. En ce sens, je place mes installations à la frontière poreuse de l’hétérotopie et de l’hétérochronie, ce sont des portes entrouvertes vers ces espaces autres où les perspectives sont mouvantes et le temps suspendu.
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Composition#
Composition# est une série de 8 installations cinétiques réalisées entre 2011 et 2016 portant sur les relations entre un phénomène auditif particulier (acouphènes, surdité, sinusoïdes, silence...) et sa traduction visuelle faite à l'aide de fil blanc, de lumière UV et de différents mécanismes.
Chaque installation de cette série a été spécialement pensée pour un lieu et une exposition particulière comme la Nuit Blanche Paris à la Sorbonne, le Palais Abdelia à Tunis lors de l'E.Fest ou encore pour l'exposition Vision au Palais de Tokyo.
Ces installations participent à un jeu d'aller-retours entre la matérialité et l'immatérialité, entre l'ouïe et la vue, et proposent aux spectateurs une expérience sensible et troublante. -
In Memoriam
Projections vidéo interactives sur une chute d'eau.
Le Fresnoy.L'histoire de l'art est peuplée de miroirs, de Velasquez à Pistoletto. Et Arthur Zerktouni, avec son installation intitulée In Memoriam, d'allonger la liste des surfaces miroitantes artistiques. Mais c'est dans les goutes d'un écran d'eau que les spectateurs se reflètent. De près, elles sont comparables à des pixels, de rouge, de vert ou de bleu. De loin, elles forment le miroir qui renvoie notre image avec une certaine latence. Nos silhouettes, en creux, sont des plus fluides et mettent un laps de temps à disparaître. Le miroir d'Arthur semble agir sur le temps, pour le ralentir quelque peu. De ce fait, nous pouvons jouer avec l'ombre de cet autre soi que l'on précède de peu.
Les spectateurs s'apercevant de cette latence font des mouvements latéraux, comme pour éprouver cette installation définitivement interactive. L'eau, que l'on imagine en circuit fermé, n'a de cesse de rafraichir l'image de ceux qui l'observent tout en évoquant les dispositifs vidéo participatifs de pionniers comme Peter Campus ou Dan Graham.Dominique Moulon.
Digitalarti / MediaArtDesign.net -
She's used to
projections vidéo sur 3 colonnes d'eau.
Projetées sur trois colonnes d'eau, des vidéos en noir et blanc représentant trois femmes de différents âges apparaissent comme des hologrammes délavés. Souvenirs d'un présent qui n'existe pas, nostalgies d'un futur incertain, cette installation, qui baigne dans une ambiance sonore ralentie, témoigne d'un temps dont les actrices ne peuvent s'échapper, des doutes de l'artiste et de sa peur d'une habitude qui ne voudrait pas s'écouler.
Les installations d'Arthur Zerktouni proposent une expérience esthétique sensible qui se caractérise par une dématérialisation du temps et de la matière. Il provoque nos sens et en dégage un univers fait d'impressions.Afif Rihai
catalogue de l'exposition MAPP'ing E-Fest. 2014. -
composition#5
fil fluorescent partiellement peint en noir
12 moteurs électriques modifiés
néons de lumière UV
dimensions variables. -
composition#8
fil blanc
7 moteurs électriques modifiés
vidéo projection générative
dimensions variables. -
Danae
Cyclique, Danae de Zerktouni s'en réfère au mythologique. Du personnage qui symbolise la pluie venant soulager une terre épuisée par la sécheresse, il façonne une installation insérée dans un temps infini, sans cesse recommencé.
En effet, des gouttes d'eau tombent parcimonieusement dans un volume en verre, provoquent des sons relayés dans l'environnement par une sonorisation mais aussi remplissent des tubes, lesquels basculent libérant des bulles d'air qui éclatent à la surface.
Comme tout ce qui touche l'eau dans son écoulement, il y a là, au moins depuis le Ta panta rei d'Héraclite d'Ephèse, une évidente fascination.Michel Voiturier
AICA Belgium.