Menu

Artistes

India Leire

India Leire, née en Angleterre en 1990, diplômée des Beaux-Arts de Paris en 2013 avec les félicitations du jury, vit à Paris et crée ses sculptures et dessins dans son atelier à Aubervilliers. Son travail a été montré dans plusieurs expositions collective, notamment à Paris (Chenaux Gallery, La Micro Galerie, La Galerie Bubenberg, Galerie Mariska Hammoudi) et à Rotterdam (Foundation B.A.D et RAM Foundation). Elle a aussi exposé dans des expositions personnelles à Paris, (Galerie Bubenberg, La Micro Galerie, Artefact) et lors des festivals de l’art en France et Belgique ( Private Choice OFF de la FIAC, Art Paris Art Fair, Parcours de l’Art Festival d’Art Contemporain d’Avignon, Affordable Art Fair Brussels, Salon des réalités Nouvelles). En 2013 elle a été finaliste du Prix Keskar et en 2015 finaliste du Prix ICART.

Comme nous le rappelle Etienne Souriau dans son vocabulaire d’esthétique, la représentation des êtres humains en sculpture a joui d’une préférence, transformée en une sorte de privilège de droit et de norme hiérarchique. De la sorte, l’art de l’animalier est estimé inférieur, quant à parler de l’art végétal, ce dernier est considéré comme simplement ornemental.
Cela établit, comment des sculpteurs prenant appui sur l’animalier et le végétal pourraient arriver à capter le regard du spectateur au même titre que ceux prenant appui sur l’humain ? Quelles incidences ces deux arts « inférieurs » et « ornementaux » auraient-ils sur la représentation et l’espace en trois dimensions ?

India Leire appartient à cette catégorie de sculptrices dont le répertoire, au premier regard du moins, s’inscrirait dans un monde animalier et végétal : des œuvres comme Lotus, The Colony ou encore Zoantharia constitueraient des aboutissements d’une recherche biologique, quand d’autres comme Siren ou Arachne relèveraient d’un intérêt pour les créatures mythologiques et le zoologique. Mais à la manière de Louise Bourgeois dont l’araignée monumentale commandée et exposée à Londres est une ode à sa mère et s’affaire à une suite de métaphores associées, les sculptures de la jeune artiste sont autant d’images se référant à l’humain et suggérant de la sorte au spectateur une réflexion sur la condition humaine.
Image de soi, image de l’autre, attraction et répulsion, séduction et toxicité, les sensations visuelles et tactiles que nous procurent ces travaux en plâtre, en terre ou en bronze concourent toutes à s’interroger sur les rôles que nous jouons en société, et comment ces derniers mis en relation avec autrui déclenchent actions et impressions, aussi bien positives que négatives. India Leire met ainsi en scène une série de fables sociales, où le spectateur invité à en faire l’expérience sensible se retrouve face à des créatures anthropomorphes devant lesquelles une morale plus ou moins explicite est à l’œuvre.

A la représentation allégorique s’ajoute chez l’artiste un certain goût pour le monochrome : plus « purement sculpture », le blanc du plâtre ou le noir du bronze se contentent des seules formes spatiales et jeux d’ombre et lumière pour permettre aux créatures représentées d’opérer leurs stratégies sur le spectateur. L’absence de couleurs permet alors de se focaliser sur le temps suggéré, celui du mouvement qu’India Leire cherche à rendre et valoriser comme apparence de vie, et donner ainsi un semblant d’existence à ces matériaux a priori immobiles. Perfection du poli, netteté de la lumière, précision de l’ombre, il s’agit ici de permettre à la matière, à ses propriétés physiques, de prendre leur plein essor et garantir aux formes circulaires que l’artiste leur donnent une présence effective dans l’espace public. Affirmation de l’œuvre, débordement du socle traditionnel, sollicitation sensorielle, ou bien tout cela mélangé et converti au service de l’appropriation plastique d’un lieu ou de l’environnement, celui où l’auteur tente de rencontrer le spectateur.
- écrit par Mathieu Lelièvre, critique d'art