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Artistes

Charles Hyaric (Le)

Né en 1987, vit et travaille à Paris.
Représenté par la Galerie Papillon

Diplômé de l'Ecole Nationale Supérieure des Beaux arts de Paris
Diplômé de l'Ecole Supérieure d'Art Graphique. Esag Penninghen

Une œuvre plastique comme un chant du monde

Ann Hindry

Pénétrer dans l’art polymorphe de Charles Le Hyaric, qu’il s’agisse d’une installation monumentale, d’une petite sculpture, d’un assemblage, d’un tableau ou d’un dessin, revient à expérimenter d’emblée une sourde mais impérative convocation au monde. La multiplicité des éléments, naturels, industriels, organiques et la variété de leurs alliages par l’artiste, ancrent ceux-ci dans la sphère physique tout en réinstallant la matière dans le champ de la pensée. C’est l’histoire de notre rapport à notre univers matériel, à la fois origine et conséquence de notre univers mental, qui est ici mis en scène par ces objets de toutes natures, ces manipulations ludiques et esthétiques du dur et du mou, du précieux et du déchet, du liquide et du solide, du rugueux et de l’onctueux, du fabriqué et du naturel… L’inventivité mais aussi l’audace de leurs déclinaisons les imposent instantanément tandis que leur puissante charge évocatrice contribue à nier toute perception d’une forme fixe et laisse ainsi libre cours à d’autres possibles. L’univers créé par l’artiste est à la fois un univers révé et un champ de réflexion aux propositions multiples. La production artistique comme élément physique et cosa mentale.

Pour Le Hyaric, construire une œuvre, depuis la plus légère, telle, par exemple, L’oiseau Jardinier, frêle branche d’arbre prise dans l’écheveau d’un nid non pas d’oiseau mais de filaments de colle, jusqu’à une installation monumentale et pénétrable telle que Regulus, vaste grotte aux parois tortueuses et accidentées dont les contours sont construits de centaines de feuilles de papier calque et dont l’espace vide et lumineux est empli d’un fond sonore indéfinissable, c’est à la fois solliciter tous les sens sans hiérarchie et introduire subtilement un principe d’indétermination. Cette pratique délibérément spéculative s’apparente à celle du geste que l’alchimiste accomplit dans l’ignorance de ses effets ultimes mais toujours dans l’espérance. L’indétermination concerne aussi la notion du temps , ou du non-temps, dans laquelle sont ainsi suspendues les œuvres. Le regardeur ne peut que ressentir comment ce joue là, dans le temps et l’espace, sa propre expérience personnelle. Un rapport exclusif à l’œuvre, rare et privilégié.

La quiddité des œuvres, quelle que soit leurs constituants, leur configuration ou leur taille, souligne l’espace - le vide - qui les sépare (ou les emplit). Dans une œuvre splendide et sombre intitulée Les funérailles de Démocrite, l’artiste rend clairement hommage au philosophe grec initiateur de la théorie « atomiste » du vide et du plein qui l’a sans doute inspiré. Chaque réalisation de Charles Le Hyaric vise à représenter un fragment de l’univers tel qu’il est perçu et/ou compris dans l’instant de son expérimentation.

A. H, Paris février 2017