Terence Pique
Terence Pique est né en 1983. Il vit en Ile-de-France et travaille entre la France et l’Espagne. Il est diplômé du Master Pro Photographie de l’Université Paris VIII. A la fin de ses études, il part vivre en Espagne plusieurs années. A la suite de cette expérience il vient s’installer en Ile-de-France afin de s’investir dans la pédagogie des arts plastiques tout en continuant ses recherches artistiques et ses allers-retours réguliers vers l’Espagne.
Dans ses recherches plastiques la photographie tient une place privilégiée bien qu’elle ne s’y restreigne pas. Scrutant les paysages et territoires en tension produits par nos sociétés urbaines, il s’applique à les questionner à travers des images dialectiques donnant la possibilité au regardeur de s’interroger face à des situations complexes. Construites dans une logique de projets, ses images sont à regarder comme des questions ouvertes qu’il pose et se pose. Cette manière de faire l’amène à imbriquer une pensée des espaces qu’il représente avec une pensée du médium qu’il expérimente, comme si l’un ne pouvait aller sans l’autre, comme si la manière de produire les images était aussi importante que ce qu’elles donnaient à voir. Ce mode opératoire lui permet ainsi de pointer les failles et les limites de son outil de représentation. D’un autre côté, même si le corps est souvent invisible dans ses images, il n’en reste pas moins présent en filigrane dans les sujets qu’il représente ou dans son implication physique. En effet, la façon dont Terence Pique mobilise parfois son propre corps, jusqu’à l’épuisement, pour réaliser certaines de ses images est à la limite de la performance et tient lieu d’un véritable engagement lui permettant de prendre la mesure du monde qui l’entoure.
Terence Pique a exposé son travail dans diverses institutions et espaces d’art principalement en France et en Espagne dont, entre autres : le Salon de Montrouge, le 100ecs (Paris), la Galerie d’art du Crous (Paris), le 109 (Nice), le CPA (Valence), LaSécu (Lille), la Casa de Velázquez (Madrid), la Casa Encendida (Madrid), le Centre d’art La Panera (Lleida), le Tenerife Espacio de las Artes (Tenerife). Il a également bénéficié de plusieurs bourses et résidences : Bourse de la Casa de Velázquez (Académie de France à Madrid), Bourse Campo Adentro (Ministerio de Cultura / Ministerio de Agricultura, Espagne), Proyecto Rampa (Madrid)
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Sous le plastique des mots, sacrifice
Série, 8 C-prints 50x60 cm, contrecollés sur aluminium, 8 vidéos HD, durées variables
Au sud de l’Espagne, dans la province d’Almeria, s’étire à perte de vue une multitude de serres agricoles faisant l’effet d’une vaste “mer de plastique“ sous laquelle sont cultivés une grande partie des légumes de nos marchés. Afin de penser ce territoire et cette situation spécifique propice aux tensions sociales, j’ai choisi de travailler avec les agriculteurs, sous le plastique, en plein été, lorsque les champs sont au repos et l’espace vidé de toute plante. Pour chaque photographie il s’agissait donc de réaliser une intervention lors de laquelle je demandais d’abord à chaque agriculteur de choisir un mot qui selon lui représentait l’agriculture intensive. Puis le mot était fabriqué et suspendu dans la serre afin d’en réaliser une photographie à la chambre. De cette façon, ces mots-objets sans racine, métaphores des plantes qui grandissent sous le plastique, disent une certaine réalité de l’agriculture intensive à l’ère de notre société de surconsommation.
Projet réalisé dans le cadre d'une résidence artistique "Campo Adentro" (Espagne)
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Un mur (dans un espace)
Installation in situ, collage, affiche recouvrant entièrement un mur de l'espace d'exposition, ± 200 impressions numériques couleur A4, dimensions variables
Avec cette photographie réalisée dans une zone périurbaine quelconque, et cadrée de suffisamment près pour créer le trouble entre intérieur et extérieur, c’est l’absence de perspective et l’enfermement qui fait signe. En effet, présentée sous la forme d’une affiche à échelle 1:1 recouvrant l’ensemble d’un mur de la salle d’exposition, cette image confronte physiquement le spectateur à un espace sans issue, bouché et muré. De cette façon c’est le jeu entre l’espace photographié, le spectateur et l’espace d’exposition qui est mis en évidence. De plus, dans une volonté de rendre sensible le processus d’installation pouvant rappeler la propre fabrication de ce mur photographié, l’affiche a volontairement été fragmentée en impressions A4 collées une-à-une côte-à-côte. Ainsi l’image faisant surface devient aussi trace d’un travail laborieux et minutieux.
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Boite sur butte témoin
4 C-prints 50x60 cm, contrecollés sur aluminium, documents et objets divers, dimensions variables
Fabriquer une boite à l’échelle du corps, à partir de matériaux glanés dans des chantiers. Une boite hermétique fonctionnant comme une camera obscura équipée sur chaque face d’un sténopé. Puis, l’abandonner sur le sommet du Cerro Almodóvar, une butte témoin au sud-est de Madrid, là où est né presque un siècle plus tôt l’Ecole de Vallecas et d’où peut s’observer, à présent, l’avancée d’un urbanisme sans qualités. De cette façon, penser l’acte photographique et son appareillage, plus que l’image même, puisque ce qui est donné à voir n’est que la boite fermée contenant l’idée d’un paysage représenté. Une boite muette qui observe sans vraiment donner à voir.
Projet réalisé dans le cadre d'une résidence artistique à la Casa de Velázquez - Académie de France (Madrid)
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Tentative pour éclipser le réel
Poster A0, impression offset, 100 exemplaires
Cette photographie est la trace d'une intervention éphémère réalisée en anamorphose au sol dans laquelle il s’agit de créer un trouble optique et de jouer avec les limites de la représentation photographique de l’espace. En effet en jouant de ce « subterfuge optique où l’apparent éclipse le réel » (Baltrusaitis, 1984), c’est autant la condition plate de l’image photographique que ses limites quant à la représentation de l’espace qui sont mis en évidence. Aussi, en réalisant cette interventions dans le cadre d'un évènement artistiques d’art in situ, c’est moins l’image résultante que la présentation d’un processus de travail long et laborieux où l’image se construit en s’imposant et en s’opposant au territoire que je souhaite rendre sensible, comme pour déconstruire l’acte photographique et remettre au coeur de l’œuvre l’expérience physique.
Intervention in situ réalisé de la cadre du Festival de l'Estran, sur la plage de Tresmeur à Trébeurden
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Les pierres en équilibre finissent toujours par tomber
21 vidéos HD, environ 1min 30sec, dimensions variable
Poser en équilibre une pierre sur un promontoire rocailleux, avec en arrière plan une vue sur la mer méditerranée, puis volontairement la faire tomber et rejouer la scène 21 fois. L’idée de cet ensemble de très courtes vidéos a quelque chose d’une relative simplicité, et pourtant, plusieurs couches de lecture s’y superposent. D’abord, cette scène fait référence à une pratique parfois apparentée à de la méditation : parvenir à faire tenir en équilibre une pierres aux formes aléatoires et montrer la tension entre la masse de la pierre et la fragilité de sa situation. Mais ici, cette pratique est tout simplement sabotée par cette main qui doucement entre dans le cadre pour la renverser volontairement. Aussi, ces vidéos nous remémorent un jeu absurde, dans lequel l’enfant, après être parvenu à faire tenir une chose quelconque en équilibre, prend un malin plaisir à le contempler chuter avec plus ou moins de fracas. Cependant, à l’origine de cet ensemble de courts films il a quelque chose de plus grave. En effet, cette série a été commencée en 2015, à un moment où un groupe terroriste faisait parler de lui en détruisant les ruines millénaire de Palmyre à grand coup d’explosifs. Bien que ces vidéos ne cherchent pas à questionner directement cet acte tragique, il y a une intention affirmée de montrer la précarité de ces « pierres en équilibre » que sont les ruines des cités du passé et qui entoure cette « mare nostrum ». D’où le choix de composer cette série de 21 vidéos, en référence au 21 pays riverains de la méditerranée.
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Les plaies (cuivre)
4 impressions sur verre acrylique, 60x80 cm
Projet en cours dans lequel il s’agit de tenter d’imbriquer une étude des paysages de l’anthropocène avec une réflexion sur la structure de l’image photographique. En effet, en choisissant de représenter des paysages miniers où la trace de l’activité humaine et ses impactes sont prégnantes et irreversibles, je cherche à pointer le rapport destructeur que l’homme entretient avec son environnement. Pour appuyer cette observation et la faire entrer en résonance avec une réflexion sur mon outils de représentation, j’ai choisi d’utiliser la technique de la trichromie qui met en évidence la construction stratiforme de la photographie. Ainsi, l’enjeu est de produire des objets photographiques jouant sur les strates de couleurs et qui laisseraient apparaître un possible « inframince » de la l’image photographique.